Épisode 50 - Nicolas Rebet

7 Tendances de Transformation Retail Révélées par Nicolas Rebet

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Dans un monde où l’expérience client est devenue le nerf de la guerre pour les marques, le retail physique doit sans cesse se réinventer. Marine Deck, experte relation client et expérience client, animatrice du podcast Le Client et Fondatrice de Cx Advisor, leader d’opinion numéro un sur LinkedIn sur la thématique de l’expérience client en France, s’entretient avec Nicolas Rebet, fondateur du Retailoscope, pour décrypter les nouvelles tendances qui transforment l’expérience client en magasin.

Du média au cabinet de conseil : l’expertise retail de Nicolas Rebet

Issu d’une famille de commerçants depuis quatre générations, Nicolas Rebet a créé Retailoscope il y a environ deux ans et demi, d’abord comme un média social sur Instagram et LinkedIn. Fort de 10 ans d’expérience dans le retail mode, luxe et beauté (notamment au Printemps Haussmann et dans la bijouterie), il a transformé cette plateforme en un véritable cabinet de conseil en stratégie retail et expérience client.

« Au départ, c’était vraiment une volonté personnelle de lancer, vu que j’adore les magasins, je voulais en parler sur les réseaux sociaux parce que je ne trouvais pas forcément ce que j’avais envie comme contenu, » explique Nicolas Rebet. « D’un petit projet personnel, on est vraiment passé à un vrai business aujourd’hui. »

L’accompagnement retail : de l’analyse de tendances aux recommandations stratégiques

L’accompagnement proposé par Retailoscope s’articule autour de deux axes principaux :

  1. L’analyse de tendances : Dans un contexte où les déplacements internationaux restent compliqués, Nicolas Rebet propose des immersions à distance dans les concepts stores les plus innovants du monde. « Je leur fais des découvertes et des immersions à distance par rapport à ces points de vente, » explique-t-il. « Parfois, je fais faire des tours du monde en 2 heures où on voit une quinzaine de points de vente différents. Ça nous permet d’aller à Shanghai, à New York, Amsterdam tout en restant à Paris. »
  2. Les recommandations stratégiques : Pour des problématiques plus spécifiques, Retailoscope accompagne les marques avec des analyses complètes et des recommandations. « On leur fait à la fois des book trend et derrière toute une analyse jusqu’aux recommandations en fonction de leurs problématiques, » précise Nicolas Rebet.

Ces problématiques concernent principalement la digitalisation en point de vente, la relation client, le merchandising et l’animation de point de vente.

La « selling ceremony » : l’art de la vente en magasin

Un concept central dans l’expertise de Nicolas Rebet est la « selling ceremony » ou cérémonie de vente, qu’il définit comme « ce que le vendeur va dérouler comme script auprès de son client. » Contrairement à certaines maisons de luxe qui imposent des scripts très rigides à leurs vendeurs, Nicolas Rebet préconise une approche plus souple :

« Je suis plutôt à l’aise avec la liberté encadrée. C’est-à-dire que si on veut que le vendeur soit à l’aise dans sa relation avec le client, soit fluide, on ne lui demande pas de répéter une phrase ou une autre. On a des types de réponses, on a des éléments de réponse, les vendeurs doivent être cadrés, formés et informés de ce qu’ils peuvent dire ou non, mais libre à eux quand même de pouvoir échanger de façon hyper fluide avec le client. »

Cette « selling ceremony » s’inscrit dans un parcours client plus large qui va de l’entrée du client dans la boutique jusqu’à son départ. Elle peut même s’étendre sur plusieurs visites, notamment dans des secteurs comme l’automobile, l’horlogerie ou la joaillerie, où un client vient en moyenne « quatre à cinq fois avant d’acheter. »

Créer une expérience client mémorable en point de vente

Pour Nicolas Rebet, définir l’expérience client en point de vente commence par l’ADN et l’héritage de la marque. « On a notre héritage, on a notre ADN, on a nos grands messages de marque qui vont déjà organiser le cadre de l’expérience globale qu’on va fournir, » explique-t-il.

Cette expérience doit être cohérente avec l’ensemble des canaux de la marque, puisque « tout client aujourd’hui est omnicanal par nature » et que « 80% des clients commencent leur contact avec la marque via du digital. »

L’expérience en boutique s’articule autour de plusieurs éléments clés :

  1. L’environnement architectural et merchandising qui doit refléter l’ADN de la marque
  2. Le rôle des vendeurs qui évolue vers celui d’influenceurs, sortant des quatre murs de la boutique pour accompagner le client avant, pendant et après l’achat
  3. Les touchpoints digitaux qui doivent apporter une réelle valeur ajoutée et non être « de la digitalisation pour la digitalisation »

La digitalisation en point de vente : au-delà des écrans

L’une des tendances fortes identifiées par Nicolas Rebet est l’évolution de la digitalisation en magasin. « On est resté très longtemps sur de la digitalisation pour la digitalisation. Voilà, on met des écrans, bon c’est bien, ça fait moderne. Mais aujourd’hui, on doit être au-delà de ça, » affirme-t-il.

Selon lui, les écrans commencent même à disparaître des nouveaux concepts pour laisser place à des outils « beaucoup plus utiles » pour les vendeurs et les clients. « Si c’est pour voir les mêmes contenus que l’on voit déjà à la télé, sur Instagram ou sur le site de la marque, ça a peu d’intérêt, » souligne-t-il.

Les outils digitaux doivent désormais apporter une réelle valeur ajoutée :

  • Pour les vendeurs : Accès rapide et fiable à l’information sur les produits et les clients. « Le client pense que le vendeur sait tout. Le vendeur ne peut pas tout savoir. Le client, en fait, il a un tropisme, c’est-à-dire que lui a trois-quatre références qu’il connaît par cœur. Le vendeur, il en a 3000 à avoir en tête, ce qui est impossible. »
  • Pour les clients : Personnalisation et visualisation des produits. Nicolas Rebet cite l’exemple de la 3D pour la personnalisation des produits de luxe ou les configurateurs de voitures dans les concessions automobiles qui permettent de projeter exactement le modèle souhaité par le client.

Un exemple particulièrement touchant évoqué par Nicolas Rebet : la possibilité de voir via un écran « l’artisan qui a créé, qui a cousu le sac, qui a monté la pierre » s’adresser directement au client. « Là, on est sur une relation hyper personnalisée, hyper touchante qu’on aura avec la marque, » explique-t-il.

Mesurer l’efficacité de l’expérience client en magasin

Comment mesurer la réussite d’une expérience client en point de vente ? Pour Nicolas Rebet, il s’agit d’utiliser un « panier de KPI » plutôt qu’un indicateur unique, car « chaque client va ressentir différemment ce qu’il va vivre dans la boutique. »

Parmi les indicateurs qu’il recommande de suivre :

  1. Les KPI traditionnels du retail : chiffre d’affaires, chiffre d’affaires au mètre carré, taux de transformation, panier moyen
  2. Les enquêtes de satisfaction et le NPS (Net Promoter Score)
  3. Les notes et commentaires Google (au-delà de 300-400 commentaires pour être représentatif)
  4. Les évaluations des clients mystère qui évaluent l’expérience globale plutôt qu’une série de points techniques
  5. La satisfaction des collaborateurs : « Si on voit que nos collaborateurs ne sont pas satisfaits de la façon dont ils travaillent, de la façon dont ils évoluent avec la maison, forcément ils vont le traduire à leur client. »

Pour les espaces relationnels ou expérientiels qui ne génèrent pas directement de ventes, Nicolas Rebet recommande de dépasser la simple analyse du chiffre d’affaires au mètre carré. « Les marques doivent penser aujourd’hui que ce n’est pas parce que la vente ne s’est pas faite en point de vente qu’elle ne se fera pas du tout, » souligne-t-il.

Il préconise également d’analyser la valeur client à vie (Customer Lifetime Value) et de comparer les performances par zone géographique pour évaluer l’impact réel des points de vente physiques.

La boutique physique : une réassurance pour le client omnicanal

Malgré la montée en puissance du e-commerce, la boutique physique conserve un rôle essentiel de réassurance pour les clients. « Quand on voit sur des études, les clients majoritairement préfèrent un vendeur qui a une boutique plutôt qu’un vendeur qui n’en a pas quand on est sur du e-commerce, parce qu’on a quand même cette réassurance physique, » explique Nicolas Rebet.

Il cite l’exemple de la FNAC, où « quasiment 60% des clients qui ont acheté sur internet ont une relation avec la boutique à un moment ou un autre. »

La boutique physique peut également jouer un rôle crucial dans la réduction des retours produits, comme le montre l’exemple de Forli. Cette marque de mode homme en précommande a constaté que « le taux de retour était nettement moins fort » pour les clients parisiens qui avaient la possibilité de découvrir les produits en boutique avant de finaliser leur achat en ligne.

L’exemple LEGO : quand l’expérience prime sur la rentabilité au mètre carré

Pour illustrer l’importance de penser au-delà des KPI traditionnels du retail, Nicolas Rebet cite l’exemple du flagship LEGO sur la 5e Avenue à New York. « Si on fait un chiffre d’affaires au mètre carré, je pense que c’est peut-être le pire chiffre d’affaires au mètre carré de la 5e Avenue, » reconnaît-il.

Pourtant, ce magasin joue un rôle stratégique pour la marque : « Il est pensé pour que tout client qui rentre dans cette boutique ait un souvenir à vie de sa relation avec LEGO. » Parmi les expériences proposées, Nicolas Rebet évoque un photomaton qui permet de construire en LEGO son visage ou la possibilité de créer son petit personnage LEGO personnalisé.

Cette approche expérientielle, bien que coûteuse et peu rentable en termes de ventes directes, renforce l’attachement à la marque et peut générer des ventes ultérieures via d’autres canaux.

Le défi des DNVB (Digital Native Vertical Brands) face au retail physique

Si les grandes marques traditionnelles s’adaptent progressivement aux nouvelles attentes des consommateurs en matière d’expérience en magasin, qu’en est-il des marques nées sur internet, les DNVB ?

Selon Nicolas Rebet, très peu de DNVB ont réussi à passer avec succès du modèle de « Digital Brand » à celui de « Retail Brand ». « Gérer une boutique, on ne gère pas ton flux de clients physique comme tu gères des nouveaux entrants sur un site. Tu ne fais pas de SEO sur une boutique, » explique-t-il.

Il cite l’exemple de Casper avec ses trois points de vente seulement, « alors que le potentiel business de la marque » est bien plus important. Ou encore Tediber, qui a ouvert « La Boîte de nuit » dans le Marais (maintenant à Toulouse), un concept store autour du matelas, mais dont le business reste « avant tout un business digital. »

Le cas de Glossier est particulièrement instructif. Cette marque de cosmétiques, très populaire aux États-Unis, avait ouvert quelques magasins avant la pandémie. Après avoir fermé la plupart pendant deux ans, elle a rouvert quelques points de vente mais a fait le choix de sous-traiter leur gestion opérationnelle. « Ils se rendent compte qu’ils ne savent pas vraiment opérer des magasins dans l’opérationnel du quotidien, parce que ce n’est pas leur métier, » analyse Nicolas Rebet.

Les 7 clés d’une transformation réussie de l’expérience retail

À travers son analyse des tendances du retail mondial, Nicolas Rebet identifie plusieurs leviers clés pour transformer avec succès l’expérience client en magasin :

  1. Définir une expérience cohérente avec l’ADN de la marque qui se traduira dans l’environnement, le merchandising et l’approche des vendeurs
  2. Repenser le rôle du vendeur vers plus d’autonomie et d’influence, lui permettant d’accompagner le client bien au-delà des murs de la boutique
  3. Digitaliser utile en privilégiant les outils qui apportent une réelle valeur ajoutée aux vendeurs et aux clients, plutôt que des écrans décoratifs
  4. Personnaliser l’expérience grâce aux données client et aux technologies comme la 3D ou la réalité augmentée
  5. Mesurer l’efficacité globale de l’expérience client via un ensemble d’indicateurs complémentaires, au-delà du simple chiffre d’affaires
  6. Penser omnicanal en reconnaissant le rôle de la boutique physique dans un parcours d’achat qui peut se finaliser ailleurs
  7. Cultiver la satisfaction des collaborateurs comme prérequis à une expérience client réussie

Pour les marques qui souhaitent rester compétitives dans un environnement retail en constante évolution, ces sept clés constituent une feuille de route précieuse pour transformer leur approche de l’expérience client en magasin.

Comme le souligne Nicolas Rebet, la boutique physique conserve un rôle essentiel dans la stratégie omnicanale des marques, mais elle doit évoluer pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs : moins transactionnelle, plus expérientielle, et parfaitement intégrée dans un parcours client fluide et cohérent.

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Marine Deck est experte relation client et expérience client, animatrice du podcast Le Client et Fondatrice de Cx Advisor. Leader d’opinion numéro un sur LinkedIn sur la thématique de l’expérience client en France.

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